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Travailleurs saisonniers : comment pallier la pénurie de main d'oeuvre ?

Travailleurs saisonniers : comment pallier la pénurie ?

De nos jours, trouver des travailleurs saisonniers devient particulièrement difficile en France. Près de 200 000 postes resteraient en effet non pourvus. Si bien des entreprises décident de se tourner vers la main d’œuvre étrangère, en facilitant notamment les démarches d’obtention des visas, bien d’autres ont compris que le secteur a tout simplement besoin d’être révisé pour retrouver une attractivité perdue depuis plusieurs années.

Comment expliquer cette pénurie de travailleurs saisonniers ? Comment y remédier ? Tentons d’y répondre dans ce dossier.

Pénurie de travailleurs saisonniers : comment l’expliquer ?

De très nombreuses activités font face à une pénurie de travailleurs saisonniers, à commencer par l’hôtellerie, la restauration et le secteur du tourisme. Pour preuve, les métiers les plus recherchés lors de la dernière saison hivernale étaient les serveurs, les cuisiniers, les vendeurs, les femmes de chambre, les préparateurs de commandes, les plongeurs, les ski-men, les réceptionnistes, les techniciens de maintenance et les employés de libre-service.

En effet, si trouver un job saisonnier pouvait auparavant nécessiter d’intenses recherches de la part des candidats et de longues heures de préparation pour peaufiner son CV et sa lettre de motivation avant de démarcher de nombreuses enseignes, ce sont aujourd’hui les affichettes « recherche personnel au poste de… » qui fleurissent sur bien des vitrines de commerces et les annonces des entreprises se multiplient sur internet.

Mais comment expliquer cette inversion radicale de la tendance ? Comment expliquer le fait que s’il existait auparavant de nombreux candidats pour un poste de saisonnier, les entreprises ne trouvent plus aujourd’hui de personnes intéressées ? Les causes de cette pénurie de saisonniers sont en réalité multiples.

Une rupture de l’activité

La crise sanitaire a grandement perturbé l’activité. Si les travailleurs, les entreprises et les demandeurs d’emploi suivaient une tendance bien ancrée depuis des décennies, les confinements successifs et la distanciation ont conduit à une réduction des activités, voire à une suspension. Certaines entreprises ont même été contraintes de mettre la clé sous la porte. Cette situation a ainsi entrainé une rupture dans le renouvellement habituel du personnel et dans la mise en œuvre des travaux saisonniers.

Une remise en question des conditions de travail

La rupture de l’activité occasionnée par la crise sanitaire a permis une prise de recul. En effet, cet instant de « pause » a poussé de nombreux travailleurs à remettre en question leurs conditions de travail et bien des saisonniers ont fait le choix de se détourner des postes qui n’offraient pas un niveau de salaire suffisant au regard des contraintes liées à ces conditions de travail particulières et au logement dans le cadre des contrats courts et/ou en temps partiel.

L’évolution des cursus

Les jeunes se sont plus majoritairement détournés des emplois saisonniers, une tendance qui s’observe en raison de la prolongation des études supérieures et des contrats d’apprentissage. En effet, le nombre de bacheliers ayant explosé en 2020 et en 2021, plus de 100 000 jeunes de plus que les années passées ont choisi la voie des études.

Les nouvelles règles mises en œuvre dans le cadre de l’assurance chômage

Les nouvelles règles mises en œuvre dans le cadre de l’assurance chômage sont destinées à favoriser l’intérêt vers les contrats de longue durée ou pérennes. Pour ce faire, l’assurance chômage pénalise les contrats courts et la répétition de ceux-ci en réduisant – voire en interrompant – les indemnisations. En conséquence, les postes saisonniers ne trouvent plus preneurs puisque ces travailleurs de courte durée se tournent désormais vers des postes plus durables pour éviter de perdre leurs droits, occasionnant ainsi un renforcement de la pénurie de main d’œuvre.

Quelles solutions face à la pénurie de travailleurs saisonniers ?

D’après les organisations patronales et syndicales, entre 100 000 et 300 000 postes saisonniers restent à pourvoir. Malgré tout, des solutions existent pour tenter d’y remédier.

Une revalorisation des salaires

Les métiers saisonniers les plus touchés sont connus pour ne plus être aussi rémunérateurs qu’auparavant. S’il y a quelques années, le fait d’enchainer les saisons permettait de gagner suffisamment d’argent pour compenser les sacrifices qu’exigeaient ces postes, ce n’est désormais plus le cas. Une saison dans le domaine du tourisme, de la restauration, de l’hôtellerie ou autre ne « paye » plus.

Envisager une véritable revalorisation salariale pourrait encourager les saisonniers à se manifester de nouveau. Néanmoins, cette hausse de la rémunération doit être conséquente pour être prise en compte, car le jeu doit en valoir la chandelle, pour reprendre le célèbre adage. Dans certains métiers, comme celui de serveur par exemple, les horaires sont décalés, les journées sont très longues et entrecoupées de pauses trop courtes pour permettre un véritable repos, les week-ends et les jours fériés n’existent pas, sans compter que toutes les heures supplémentaires sont loin d’être comptabilisées. Difficile d’envisager une vie de famille dans ces conditions, ni même une simple vie de couple ou encore la pratique de loisirs. Rappelons par ailleurs que l’assurance chômage ne permet plus de bénéficier de droits suffisants pour vivre décemment, ce qui n’incite plus à se tourner vers ces emplois saisonniers.

La rémunération n’est plus à la hauteur des sacrifices exigés et ces saisonniers préfèrent se tourner désormais vers des emplois plus « faciles », plus pérennes et plus classiques, d’autant plus qu’il est désormais bien plus simple de négocier son salaire auprès de nombreuses entreprises.

Une amélioration des conditions de travail

Bien des emplois saisonniers sont assortis d’horaires décalés, insuffisants, pas toujours déclarés, etc. S’il est désormais peu tentant de travailler plus de 10 heures par jour dans la restauration pour un salaire dérisoire et des heures supplémentaires souvent ignorées, se contenter d’un contrat court de moins de 35 heures devient tout aussi décourageant. La rémunération est là aussi trop faible et les heures restent trop nombreuses pour cumuler deux emplois saisonniers dans des conditions saines.

Revoir les conditions de travail de ces emplois saisonniers devient donc une priorité. Horaires, temps de travail, heures supplémentaires, conditions d’emploi, engagement sur la journée, repos… bien des points sont à repenser pour attirer de nouveaux saisonniers.

Un travail sur l’image

Les emplois saisonniers bénéficient bien souvent d’une mauvaise image. Ceux-ci sont souvent catalogués comme des postes dédiés à des jeunes qui n’ont encore pas construit de vie de couple ni fondé de famille. Pourtant, les saisonniers sont des personnes aux profils bien différents.

Mais pour répondre aux contraintes et aux besoins de chacun, il est important pour ce domaine de s’adapter et de revaloriser son image par des mesures concrètes. En effet, les confinements ont permis aux saisonniers de prendre suffisamment de recul pour rechercher un nouvel équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée, équilibre qui n’existe pas ou trop peu dans les emplois saisonniers.

Une révision de l’assurance chômage

Avec un emploi prenant, mais de courte durée, qui nécessite des sacrifices constants et qui n’est pas valorisé à sa juste valeur en matière de rémunération, il devient de plus en plus difficile d’attirer des travailleurs saisonniers. Les nouvelles normes de l’assurance chômage ont contribué à décourager bien des habitués qui ne trouvent plus dans ces missions temporaires un intérêt véritable.

Une révision de l’assurance chômage, destinée à l’adapter à la réalité de ces métiers indispensables, est en conséquence nécessaire. Certains sollicitent même la création d’un statut spécifique pour les travailleurs saisonniers, qui s’apparenterait à celui des intermittents du spectacle.

Une formation améliorée

Il devient également indispensable d’envisager de développer la formation des candidats dans les métiers concernés, au sein d’écoles et de centres de formation spécialisés. Bien des employeurs se disent prêts à investir dans ce domaine afin de recruter du personnel plus compétent et mieux préparé. Cela pourrait contribuer à favoriser l’embauche de saisonniers mieux disposés à la pratique de ces métiers et à permettre aux employeurs de dénicher des talents potentiels.

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