Dépistage de drogue ou d'alcool en entreprise : que dit la loi ?
En France, la loi interdit la consommation et la détention de drogues. Si l’encadrement est un peu plus flou concernant l’alcool, les mêmes conditions s’appliquent au sein des entreprises. Un employeur étant le garant de la sécurité de ses salariés, il est en droit de mettre en œuvre des dépistages de drogue et d’alcool au sein de ses locaux. Toutefois, la réalisation de ces tests est strictement encadrée et soumise à des règles strictes afin de protéger les salariés.
Ainsi, que prévoit la loi en matière de dépistage de drogue et d’alcool en entreprise ? Que peut faire l’employeur ? Qui peut-il tester ? Comment ces dépistages doivent-ils être organisés ? Quelle législation interne encadre ces contrôles ? Quels sont les droits des salariés testés et quels risques encourent-ils ? Faisons le tour de la question dans ce dossier.
L’alcool et la drogue en entreprise : que dit la loi ?
En vertu de l’article R. 4228-20 du Code du travail, aucune boisson alcoolisée autre que la bière, le cidre, le poiré et le vin n’est autorisée sur le lieu de travail. Il incombe de la responsabilité de l’employeur ou de la hiérarchie d’interdire cette introduction de boissons considérées comme illicites au sein de l’entreprise. De même, une personne en état d’ivresse ne peut pénétrer dans l’entreprise et l’employeur se doit de lui en interdire l’accès pour des raisons de sécurité. Toutefois, une interdiction totale de la consommation d’alcool n’est possible qu’à condition de justifier les raisons de cette interdiction au sein du règlement intérieur et de prouver la nécessité de cette interdiction par le danger ou le risque que cette consommation d’alcool serait susceptible de provoquer. Dès lors qu’un salarié exerçant un métier à risque (cariste, conducteur d’une machine dangereuse, etc.) est en état d’ébriété à son poste, il peut se blesser ou blesser un tiers. En raison du danger encouru, cela constitue une faute grave.
Le Code pénal interdit quant à lui la détention et la consommation de drogues sur le lieu du travail et dans toute autre situation, dans la mesure où la possession et la consommation de drogues sont strictement interdites en France. Là encore, le salarié pris en faute encourt un jugement pour faute grave. En effet, la sécurité du personnel est également menacée lorsqu’un salarié est sous l’emprise de stupéfiants.
Qu’en est-il des dépistages de drogue ou d’alcool en entreprise ?
Dans la mesure où l’employeur est le garant de la sécurité de son personnel, il est en droit de réaliser des dépistages de drogue et d’alcool au sein de son entreprise. Néanmoins, ce type de test ne peut être effectué dans n’importe quelles conditions. La loi les encadre de manière stricte.
La mention obligatoire au sein du règlement intérieur
Le règlement intérieur de l’entreprise doit impérativement mentionner la possibilité pour l’employeur d’effectuer ce type de test dans le but de dépister une éventuelle consommation de drogue ou d’alcool parmi ses salariés. Les modalités de réalisation des tests doivent également être clairement mentionnées.
Au sein des entreprises de moins de 50 salariés, qui ne sont pas dans l’obligation de rédiger un règlement intérieur, la possibilité du dépistage doit être stipulée par le biais d’une note de service dans les mêmes conditions.
Les risques liés à la consommation de drogue et d’alcool sur le lieu de travail doivent être identifiés par l’employeur au sein du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) et faire l’objet de mesures de prévention associées, formulées avec l’aide d’un médecin du travail.
La justification des risques et des dangers
Un dépistage de drogue ou d’alcool ne peut être réalisé de manière arbitraire. Il doit obligatoirement être justifié par les risques et les dangers potentiels occasionnés par un salarié sous leur emprise lors de l’exercice de son activité.
Le respect des libertés individuelles
En raison de la nécessité de respecter les libertés individuelles, le salarié doit être informé à l’avance du test de dépistage que l’employeur souhaite lui faire subir. Il devra en outre donner son accord pour le réaliser, mais il est à noter que son refus a pour conséquence une sanction disciplinaire.
En cas d’aveux d’un salarié sous emprise
Si un salarié déclare de lui-même être sous l’emprise de la drogue sur son lieu de travail, l’employeur doit obtenir ses aveux en présence de témoins. Seule cette méthode permettra de les rendre recevables devant le conseil des prud’hommes en cas de procédure de justice.
L’importance de la prévention
Dès lors qu’une entreprise a identifié des postes à risques et des dangers liés à la consommation de drogue et d’alcool au sein de ses locaux, il est recommandé de mettre en place des actions de sensibilisation des équipes par le biais d’outils de communication adaptés. Il est possible de proposer des stages ou des formations de sensibilisation aux addictions afin de mieux renseigner le personnel de l’entreprise sur les risques accompagnant ces substances malheureusement banalisées et de prévenir certains comportements addictifs.
Comment se déroule un dépistage de drogue ou d’alcool en entreprise ?
Le dépistage de drogue ou d’alcool peut être effectué en entreprise au moyen de tests spécifiques.
- L’alcootest est le test de dépistage basique qui permet de détecter l’alcoolémie.
- Le test salivaire THC permet de réaliser undépistage de drogue et d’alcool. Le test anti-drogue est encadré par la décision du Conseil d’État n° 394178 du 5 décembre 2016. Ne s’agissant pas d’un examen médical, la présence d’un médecin n’est pas obligatoire.
- Le test urinaire pour le dépistage des drogues est possible, mais il doit être prévu au sein du règlement intérieur et il ne peut être effectué que par un biologiste médical. Il est à noter qu’un salarié est libre de contester les résultats d’un test salivaire positif et d’exiger une contre-expertise par le biais d’un test urinaire, voire d’une prise de sang. Dans ce cas, le nouveau test sera aux frais de l’employeur.
Qui est concerné ?
Un employeur ne peut pas décider de tester tous ses salariés ou certains d’entre eux de manière arbitraire. En effet, il ne peut pratiquer un dépistage d’alcoolémie que sur des salariés dont l’activité est susceptible d’exposer des personnes ou des biens à un danger. De même, le dépistage de drogue ne peut être effectué que sur des salariés exerçant un poste hypersensible susceptible de les mettre en danger ou de mettre des tiers en danger.
Ainsi, tous les postes susceptibles d’être testés et les motifs pour lesquels ils sont susceptibles de l’être doivent être clairement indiqués dans le règlement intérieur de l’entreprise.
Qui peut réaliser ce type de dépistage ?
La réalisation d’un alcootest ou d’un test salivaire peut tout à fait être confiée à l’employeur ou à un supérieur hiérarchique du salarié testé. Si la présence d’un médecin n’est nullement exigée, un tiers devra systématiquement être présent lors de la réalisation du test de dépistage.
Il est à noter que l’employeur et le tiers présent sont tenus au respect du secret professionnel quant au résultat du test.
Quand le test doit-il est effectué ?
Le test peut être réalisé de manière aléatoire, c’est-à-dire à tout moment de la journée de travail. Toutefois, là encore, cela doit impérativement être indiqué dans le règlement intérieur de l’entreprise. Si ce document mentionne une temporalité précise, l’employeur se doit de la respecter. Dans le cas contraire, le contrôle ne sera pas valable.
Le salarié peut-il refuser d’être testé ?
Nous l’avons indiqué, un salarié peut refuser d’être testé. La loi stipule qu’il doit être informé en amont par son employeur du contrôle à venir.
Cependant, il faut savoir qu’en cas de refus – et à condition que la réalisation du dépistage soit justifiée et licite – ledit salarié commet une faute. Il est donc soumis à une sanction disciplinaire qui peut mener au licenciement.
Que se passe-t-il en cas de résultat positif ?
Si le résultat du test de dépistage de drogue ou d’alcool est positif, le salarié a le droit d’exiger une contre-expertise. Ce droit doit clairement figurer dans le règlement intérieur. Dans ce cas, la procédure est la suivante.
- Dans le cadre d’un dépistage d’alcoolémie, le salarié peut se soumettre à un éthylomètre, appareil plus fiable que l’alcootest.
- Dans le cadre d’un dépistage salivaire de drogue, le salarié peut subir un nouveau dépistage, médical, aux frais de l’employeur. Il sera ainsi soumis à un prélèvement sanguin ou urinaire.
Quoi qu’il en soit, en cas de résultat positif, le salarié testé risque une sanction disciplinaire qui peut aller jusqu’à son licenciement. S’il commet une erreur susceptible de mettre sa santé ou celle de ses collègues en danger alors qu’il exerce son activité sous l’emprise de la drogue ou de l’alcool, il s’expose au risque de poursuites pénales. De même, s’il possède de la drogue et qu’il la détient sur son lieu de travail, il risque une sanction pouvant aller jusqu’à 75 000 euros d’amende et jusqu’à 10 ans d’emprisonnement.
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