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Comment licencier un salarié protégé ?

Comment licencier un salarié protégé ?

Pour éviter tout licenciement abusif et faire face à la méconnaissance de certains employeurs, le Code du travail a établi une liste de salariés protégés. Ces collaborateurs, qui relèvent majoritairement des représentants du personnel, sont en effet préservés d’un licenciement à titre de représailles ou discriminatoire par la mise en place de mesures de protection. Néanmoins, ces salariés protégés ne le sont pas face à tous les motifs de licenciement et il demeure possible de les licencier dans certaines situations, notamment en cas de faute grave. Dans ce cadre, l’employeur doit impérativement respecter une procédure stricte définie par la loi et se soumettre à la décision de l’inspection du travail et d’autres instances décisionnaires éventuellement sollicitées dans le cadre d’un recours.

Qui sont les salariés protégés ? Dans quel cadre est-il possible de les licencier ? Quelle procédure faut-il respecter pour opérer un tel licenciement ? Quelles sont les conséquences pour le salarié protégé en cas de faute ou de non-respect des décisions et démarches par l’employeur ? Nos réponses dans ce dossier.

Qui sont les salariés protégés ?

L’article L. 2411-1 du Code du travail a défini une liste des salariés protégés. Il s’agit de :

  • les représentants élus du personnel (les membres du CSE, les membres de la CSSCT, les délégués du personnel) ;
  • les représentants syndicaux ;
  • les salariés dont le mandat élu ou syndical est achevé, pendant une durée respective de 6 mois et de 12 mois ;
  • les candidats aux élections ;
  • les salariés ayant sollicité l’organisation d’élections ;
  • les salariés ayant manifesté leur volonté d’être candidats aux élections (situation d’imminence de candidature) ;
  • les conseillers prud’homaux ;
  • les conseillers des salariés.

Sont également considérés comme protégés les femmes en congé maternité, les salariés en arrêt maladie et les salariés souffrant d’un handicap.

Ces salariés sont protégés contre le licenciement. La loi prévoit en effet des mesures de protection pour éviter tout risque de licenciement abusif, notamment dans le cadre de représailles, pour ces salariés élus, candidats ou exposés. Si l’employeur peut légalement licencier un salarié protégé en cas de faute grave, d’inaptitude au travail ou dans le cadre d’un licenciement économique, il ne peut le licencier pour un autre motif et sans avoir au préalable sollicité et obtenu d’autorisation d’une autorité compétente.

Comment licencier un salarié protégé ? Quelle procédure suivre ?

Quelle est la procédure de licenciement ?

Pour licencier un salarié protégé, l’employeur se doit de respecter une procédure stricte qui se découpe en plusieurs étapes.

  • Le salarié est convoqué à un examen préalable.
  • Le comité d’entreprise est consulté. L’employeur présente les motifs de ce licenciement et le comité, après discussion, doit rendre un avis favorable ou défavorable.
  • En cas d’avis favorable, l’inspecteur du travail est saisi. Le procès-verbal de la réunion doit lui être remis. Il lui faut déterminer si le motif de licenciement est justifié et émettre à son tour un avis. S’il est favorable, les conseils de prud’hommes n’auront plus la possibilité d’intervenir.

Quel motif de licenciement pour un salarié protégé ?

Pour déterminer s’il s’agit d’un juste motif, il suffit de se référer à la jurisprudence du Conseil d’État.

  • En cas de licenciement basé sur un motif personnel non fautif, l’inspecteur du travail constatera l’existence d’une insuffisance de résultat et estimera si celle-ci est justifiée ou non.
  • En cas de licenciement basé sur un motif personnel fautif, la faute en question doit atteindre un certain niveau de gravité. L’inspecteur du travail doit estimer si le licenciement est justifié et vérifier que l’employeur a bien cherché à mettre en place des solutions (reclassement, etc.).

Bien entendu, dans tous les cas, l’inspecteur du travail doit s’assurer que le motif du licenciement n’est pas discriminant.

Suite à ces étapes, l’employeur a deux possibilités. Si l’inspecteur du travail a donné son accord, il peut légalement prononcer le licenciement. En revanche, si l’inspecteur du travail refuse d’accorder la procédure, l’employeur ne peut licencier son salarié.

Néanmoins, en cas de refus, l’employeur a la possibilité de contester la décision de l’inspecteur du travail en déposant un recours administratif auprès du ministre du Travail et/ou un recours contentieux. Le ministre du Travail mandate la Direction départementale du travail pour mener une enquête qui permettra d’aboutir à la confirmation du refus de l’inspecteur du travail d’autoriser le licenciement ou à l’annulation de celui-ci. Les décisions contre le licenciement rendues par l’inspecteur du travail ou le ministre du Travail peuvent être également contestées auprès d’un tribunal administratif, auprès de la Cour d’appel administrative et auprès du Conseil d’État.

Quelles sont les conséquences en cas de non-respect de la procédure ?

Si l’employeur n’a pas respecté la procédure à suivre dans le cadre du licenciement d’un salarié protégé et/ou les décisions défavorables à ce licenciement rendues par l’inspecteur du travail ou toute autre instance décisionnelle, il s’expose à des sanctions. Par ailleurs, il n’est également pas rare qu’un employeur oublie tout simplement que le salarié visé est protégé ou ignore ce statut particulier.

Dans ce cas, deux conséquences sont à noter : la réinsertion du salarié protégé injustement ou abusivement licencié et son indemnisation.

La réinsertion du salarié protégé

Dans ce cadre, on distingue trois situations.

  • La réinsertion après décision de licenciement abusive ou injustifiée : si le salarié protégé est licencié et que l’employeur n’a pas respecté la procédure à suivre, qu’il n’a pas respecté l’avis de l’inspecteur du travail ou d’une autre instance décisionnaire ou encore qu’il ignorait ou a omis le statut protégé dudit salarié, ce dernier a le droit d’être réintégré au sein de l’entreprise. Dans ce cas, le salarié protégé peut saisir le conseil des prud’hommes pour obtenir cette réintégration, accompagnée de dommages et intérêts.
  • La réinsertion après recours : si la demande de licenciement du salarié protégé déposée par l’employeur a été validée par l’inspecteur du travail puis annulée par une autre instance décisionnelle après recours dudit salarié, ce dernier peut également être réintégré au sein de l’entreprise. Pour ce faire, il lui faut obtenir sa réintégration à son poste d’origine dans un délai de deux mois après la notification de l’annulation de l’accord de licenciement.
  • Le refus de réinsertion : il est également possible que le salarié protégé refuse d’être réintégré. Dans ce cas, l’employeur doit respecter cette volonté et il ne dispose d’aucun recours. En effet, s’il tentait de contraindre le salarié, il serait accusé de délit d’entrave.

L’indemnisation du salarié protégé

En plus de sa réinsertion, le salarié protégé peut bénéficier d’une indemnisation.

En cas d’annulation de la décision de licenciement ou de retrait de l’autorisation de licenciement

En cas d’annulation de la décision de licenciement par les instances administratives ou de retrait de l’autorisation de licenciement par le ministre du Travail, l’article L. 2422-4 du Code du travail prévoit le versement d’une indemnisation au salarié protégé. Le texte de loi indique que ce « salarié a droit au paiement d’une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration », et ce, « s’il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision ».

Le préjudice subi ici mentionné est relatif à la perte de salaire occasionnée, c’est-à-dire aux rémunérations non perçues entre le jour du licenciement et le jour de la réintégration du salarié protégé. Cette indemnisation est un droit que le salarié peut légalement percevoir en réparation du préjudice subi.

Par ailleurs, il peut exiger le versement de cette indemnisation y compris s’il ne souhaite pas réintégrer l’entreprise. Dans ce cas, il dispose là encore d’un délai de deux mois après la notification d’annulation ou de retrait de la décision de licenciement pour déposer sa demande d’indemnisation. Il s’agit du même délai pour manifester son souhait de réintégration.

Néanmoins, il faut savoir que la Cour de cassation prévoit que l’indemnisation versée au salarié protégé en réparation au préjudice subi doit être recalculée s’il a perçu, pendant ce délai, d’autres formes de revenus. En effet, le montant total de son indemnisation – qui correspond à la perte de salaire occasionnée – doit être retranché des éventuels autres revenus professionnels perçus pendant cette période ou des éventuels droits au chômage reçus. Pour le calcul de cette imputation sur indemnisation, la feuille d’imposition du salarié peut être exigée.

En cas de licenciement pour non-respect de la procédure (volontaire ou non) de l’employeur

En cas de licenciement opéré alors que l’employeur n’a pas respecté le refus de licenciement ou que l’employeur a licencié le salarié protégé sans autorisation préalable, le salarié protégé a le droit de percevoir une indemnisation qui correspond aux salaires qui auraient dû lui être versés pendant sa période de protection.

Dans ce cas, il s’agit d’une indemnisation forfaitaire qui n’entraine aucune retenue ou déduction d’éventuelles autres sources de revenus.

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